Au lendemain de la libération de trois otages israéliennes, dimanche 19 janvier, le cessez-le-feu entre l’État hébreu et le Hamas dans la bande de Gaza s’est maintenu lundi, tandis que l’aide humanitaire a commencé à affluer dans le territoire palestinien.
Au deuxième jour de cette trêve, des habitants et des médecins de Gaza ont déclaré à l’agence Reuters que, dans l’ensemble, le cessez-le-feu semblait tenir, bien qu’il y ait eu des incidents isolés. Les médecins ont déclaré que huit personnes avaient été touchées par des tirs israéliens depuis lundi matin dans la ville frontalière de Rafah, sans donner de détails sur leur état de santé.
L’armée israélienne a déclaré qu’elle vérifiait ces informations.
Tôt lundi matin, 90 Palestiniens ont été libérés par Israël, en vertu de l’échange prévu lors de cette première phase du cessez-le-feu, qui doit durer 42 jours.
À Beitunia, près de la prison d’Ofer, des Palestiniens en liesse ont accueilli, pendant la nuit, les premiers détenus libérés.
La journaliste palestinienne Bouchra al-Tawil, emprisonnée en mars 2024, fait partie de ce premier contingent de détenus relâchés. Parmi eux, majoritairement des femmes et des enfants.
Selon un responsable du mouvement islamiste palestinien, les prochaines libérations auront lieu samedi. « Trois ou quatre femmes enlevées » seront libérées chaque semaine, selon l’armée israélienne.
Gaza se « relèvera » promet le Hamas
Durant la première phase de l’accord, 33 otages israéliens retenus à Gaza doivent être libérés en échange d’environ 1 900 Palestiniens détenus par Israël, et l’armée israélienne doit se retirer d’une partie du territoire côtier.
Les termes de la deuxième phase, qui doit voir la fin définitive de la guerre et la libération de tous les otages, doivent être négociés au cours des six semaines à venir. Si les deux premières étapes se déroulent comme prévu, la troisième et dernière portera sur la reconstruction de Gaza et la restitution des corps des otages morts.
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a cependant prévenu qu’Israël se réservait « le droit de reprendre la guerre si besoin ».
Les attaques terroristes du 7 octobre 2023 ont entraîné la mort de 1 210 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles israéliennes.
Sur 251 personnes enlevées, 91 restent otages à Gaza, dont 34 sont mortes selon l’armée israélienne.
Au moins 46 913 personnes, majoritairement des civils, ont été tuées dans l’offensive israélienne de représailles à Gaza, selon les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l’ONU.
Le mouvement islamiste a juré, lundi dans un communiqué, que « Gaza, avec son grand peuple et son inébranlable volonté, se relèvera pour reconstruire » ce que les bombardements israéliens ont détruit. Il a ajouté que ces efforts se poursuivraient « jusqu’à ce que l’occupation soit vaincue et un État palestinien établi avec Jérusalem comme capitale ».
Selon les données du centre satellitaire des Nations Unies (Unosat), publiée en décembre, les deux tiers des structures de Gaza avant la guerre (soit plus de 170 000 bâtiments), ont été endommagées ou détruites. Actuellement, plus d’1,8 million de personnes ont besoin d’un abri d’urgence à Gaza, selon le bureau humanitaire des Nations unies.
« Nous n’avons même pas pu trouver l’emplacement exact de nos maisons »
C’est donc au milieu d’un paysage apocalyptique de ruines poussiéreuses et d’immeubles éventrés, que des milliers de Palestiniens ont pris la route dimanche pour tenter de retrouver leur maison.
« Nous sommes finalement chez nous. Il n’y a plus de maison, seulement des ruines. Mais c’est notre maison », a témoigné Rana Mohsen, une femme de 43 ans rentrée à Jabalia, dans le nord du territoire.
« Des destructions massives, indescriptibles, jamais vues dans l’Histoire », a ajouté Fouad Abu Jalboa, un autre déplacé.
Même scène à Rafah, tout au Sud. « Nous n’avons même pas pu trouver l’emplacement exact de nos maisons », a raconté Maria Gad El Haq, déplacée elle aussi par la guerre comme la quasi-totalité des 2,4 millions d’habitants de Gaza.
De son côté, la Défense civile palestinienne a annoncé, lundi, avoir engagé des recherches pour retrouver les corps de milliers de Palestiniens ensevelis sous les décombres à Gaza.
« Nous sommes à la recherche de 10 000 martyrs (morts), dont les corps sont encore sous les décombres », a déclaré Mahmoud Bassal, porte-parole de la Défense civile.
Au moins 2 840 se sont décomposés, il n’en reste plus de traces, a-t-il ajouté.
En Israël, les trois otages libérées, Emily Damari, 28 ans, Doron Steinbrecher, 31 ans, et Romi Gonen, 24 ans, qui ont été remises dimanche au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Gaza-ville, ont retrouvé leurs proches et ont été hospitalisées « dans un état stable », selon un médecin.
« Selon ses propres mots, Emily est la femme la plus heureuse au monde, elle est revenue à la vie », a témoigné lundi Mandy, la mère de la jeune femme, qui a perdu deux doigts pendant sa captivité.
« D’autres familles attendent avec anxiété le retour de leurs bien-aimés », a souligné la présidente du CICR, Mirjana Spoljaric, en appelant toutes les parties à « assurer que les prochaines opérations se déroulent en toute sécurité ».
« Atteindre un million de personnes »
Cette trêve s’accompagne d’un afflux de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza, soumise par Israël à un siège total.
« Après 15 mois de guerre, les besoins humanitaires sont pharamineux », a souligné le chef du bureau des Affaires humanitaires de l’ONU (Ocha), Tom Flechter, en indiquant que 630 camions étaient entrés, dimanche, à Gaza, dont 300 destinés au nord du territoire.
« Nous essayons d’atteindre un million de personnes dans les plus brefs délais », a déclaré à l’AFP Carl Skau, directeur exécutif adjoint du Programme alimentaire mondial. Le Qatar a annoncé, lui, l’envoi quotidien de plus d’un million de litres de carburant pendant dix jours.
Le Qatar a annoncé, lundi, l’envoi d’1,25 million de litres de carburant par jour vers la bande de Gaza pendant les dix premiers jours de la trêve, selon un communiqué de son ministère des Affaires étrangères.
L’émirat gazier a précisé avoir « mis en place un pont terrestre pour fournir à la bande de Gaza 12,5 millions de litres de carburant pendant les dix premiers jours de l’accord de cessez-le-feu (…) à raison d’1,25 million de litres par jour », pour les besoins de ce territoire palestinien qui compte 2,4 millions d’habitants.
En novembre 2023, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) avait estimé ses besoins en carburant à 160 000 litres par jour pour ses opérations humanitaires de base.