Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire est assurément à un tournant avec l’élection à sa présidence de Tidjane Thiam. Premier polytechnicien du pays, petit-neveu de son fondateur en 1946, Félix Houphouët-Boigny, successeur de Henri Konan Bédié, 2e chef de l’État ivoirien, il est surtout d’une nouvelle génération parce que né après l’indépendance du pays, un moment pour lequel son grand-oncle s’est battu avec acharnement depuis qu’il avait été porté en 1944 à la tête du Syndicat agricole.
Regroupement de plusieurs planteurs africains militant contre la colonisation, ce syndicat réclamait de meilleures conditions de travail, une hausse sérieuse des salaires des ouvriers agricoles et l’abolition du travail forcé. Sevré d’un président à la tête de l’État depuis décembre 1999, moment où les militaires, sous la conduite du général Guéï, ont pris le pouvoir, le PDCI entend se mettre en ordre de bataille pour porter Tidjane Thiam à la présidence de la République lors de la prochaine présidentielle de 2025.
Du chantier de l’unité et la cohésion du PDCI?
« Moi, Cheick Tidjane Thiam, je jure solennellement sur l’honneur, devant le Congrès, de respecter et de défendre fidèlement les statuts et le règlement intérieur du PDCI-RDA, d’incarner son unité et sa cohésion, son intégrité et son indépendance ; de remplir consciencieusement les devoirs de ma charge dans le strict respect de mes obligations, de la Constitution, des lois et règlements de la Côte d’Ivoire ; de servir avec loyauté le Parti démocratique de Côte d’Ivoire ,Rassemblement démocratique africain. Que le PDCI-RDA me retire sa confiance si je trahis ce serment. Je le jure. »
Aussitôt porté à la tête du parti, Tidjane Thiam a donc prêté serment, se sachant néanmoins attendu sur un défi interne à sa formation politique : celui de l’unité. Celle-ci a en effet été sérieusement secouée pendant le processus de désignation qui a conduit à son élection à la tête du PDCI.
Face aux rebondissements qui ont vu des candidatures pourtant considérées comme sérieuses se retirer d’elles-mêmes ou être écartées par les instances du parti, au regard de certaines déclarations de militants en vue, comme Jean-Louis Billon, PDG du groupe agro-industriel Sifca, ou Thierry Tanoh, ex-directeur général d’Ecobank, faisant penser que tout avait été mis en œuvre pour favoriser Tidjane Thiam, sans compter le coup de théâtre de la suspension la veille de sa tenue, par le tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau, du 8e Congrès extraordinaire prévu le 16 décembre dernier, un chantier important de reconstruction et de réorganisation du parti attend l’ex-ministre du Plan et du Développement de Henri Konan Bédié. Une étape d’autant plus importante qu’il s’agit désormais de se mettre en orbite pour la présidentielle de 2025.
A la bataille pour la présidentielle de 2025
Preuve que le Parti démocratique de Côte d’Ivoire a conscience de l’importance de ne pas perdre de temps à un moment qui marque pour lui un tournant historique : le Congrès a confié à Tidjane Thiam « la mission prioritaire de redynamiser, conduire et porter, par les voies démocratiques, le PDCI-RDA au pouvoir d’État en 2025 ».
Désormais de plain-pied dans l’arène politique avec une ambition présidentielle clairement identifiée, l’économiste et financier à la stature internationale reconnue va devoir affronter ses adversaires du marigot politique ivoirien en tête desquels Alassane Ouattara, actuel chef de l’État, ne sera pas des moindres.
Pour cela, il va devoir personnellement labourer le terrain et réincarner à sa façon l’homme de terroir qu’a été son grand-oncle Félix Houphouët-Boigny. Ainsi, le travail effectué auprès des militants ainsi que la redynamisation de toutes les sections du PDCI seront des défis importants qu’il devra relever. C’est que l’enjeu est de taille pour l’ex-président de Credit Suisse.
Admiré par de nombreux Ivoiriens pour son parcours, Tidjane Thiam devra se montrer à hauteur d’homme par l’aspect concret de ses propositions pour trouver des solutions aux nombreux problèmes qui assaillent les Ivoiriens, du pouvoir d’achat aux questions de santé et d’éducation en passant par celles autour du travail et de la création d’emplois.
Face aux autres formations politiques, Tidjane Thiam devra relever le challenge d’un programme facilement identifiable par la grande masse des Ivoiriens, un programme à la fois populaire, réaliste et prometteur quant à l’avenir. Sur le plan économique mais aussi politique avec une plus grande inclusivité.
Président du PDCI, Tidjane Thiam devra s’appuyer sur une habileté défensive de haut niveau, car devant compter avec des manœuvres politiques qui ne manqueront pas derrière l’instrumentalisation de tel ou tel levier des électorats ou de son absence prolongée du pays.
Alors que le paysage politique ivoirien semble dominé par le parti d‘Alassane Ouattara, le RHDP, lequel a gagné haut la main les élections municipales et régionales de septembre dernier, la tâche s’annonce ardue pour Tidjane Thiam.
Dans la perspective de la présidentielle de 2025, il devra à la fois consolider le PDCI et s’aménager des alliés potentiels parmi les autres partis pour un éventuel second tour. Une équation à plusieurs inconnues sur laquelle le polytechnicien qu’il est a certainement commencé à plancher avec ses équipes.