Niger : « le peuple nigérien va dicter ses futures relations avec la France »

Niger

Une semaine après l’annonce par Emmanuel Macron du départ de son ambassadeur et des troupes françaises, le nouvel homme fort du Niger s’est exprimé à la télévision.

« Le peuple nigérien va désormais dicter la forme des futures relations avec la France », a affirmé le général Abdourahamane Tiani samedi 30 septembre au soir dans deux interviews en langues locales, une en djerma, l’autre en haoussa, à la télévision nationale, Tele Sahel.

Ces propos ont été tenus une semaine après l’annonce par le président français du départ de l’ambassadeur à Niamey, Sylvain Itté, rentré à Paris mercredi 27 septembre, et de celui « d’ici la fin de l’année » des quelque 1 500 militaires que compte la France au Niger, dans le cadre de la lutte anti-jihadiste.

Bras de fer entre le Niger et la France

Le régime nigérien avait ordonné l’expulsion du diplomate et dénoncé des accords de coopération militaire avec Paris, répétant vouloir le retrait des troupes françaises. « Nous sommes dans les préparatifs en vue de leur départ », a affirmé le général Tiani.

Le régime militaire est engagé dans un bras de fer avec la France depuis le coup d’État du 26 juillet qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum, allié de l’ex-puissance coloniale. Celle-ci ne reconnaît pas les nouvelles autorités du Niger.

Risque d’effondrement du Sahel

« Comme ils (les Français) étaient là pour combattre le terrorisme et qu’ils ont unilatéralement arrêté toute coopération (…) leur séjour au Niger est arrivé à son terme », a déclaré Abdourahamane Tiani. « Ils ont dit qu’ils étaient venus pour aider à éradiquer le terrorisme. Non seulement ils n’ont pas chassé les terroristes mais les terroristes sont de plus en plus nombreux » , a-t-il déploré.

Le pays est miné à l’ouest et au sud-est par des attaques jihadistes récurrentes, perpétrées par des groupes liés à Al-Qaïda et à l’État islamique. De son côté, le ministre français des Armées Sébastien Lecornu a estimé vendredi que « le Sahel risquait de s’effondrer sur lui-même », suite au départ des soldats français du Mali et du Burkina Faso – également dirigés par des militaires – et bientôt du Niger.

« Nous avons été une solution pour la sécurité du Sahel », a-t-il insisté, non sans justifier une nouvelle fois son coup d’État par les attaques jihadistes. Le « pays risquait un jour de disparaître, nous avons alors décidé de prendre des mesures puisque les gens (au pouvoir sous Bazoum) n’écoutaient pas leurs conseillers militaires », a-t-il déclaré.

La France, par ailleurs, « n’est pas le seul pays avec lequel nous avons des relations culturelles », a-t-il ajouté, en réaction à la suspension de la délivrance de visas par Paris depuis le Niger, le Burkina Faso et le Mali.

« Dialogue national »

« Nous n’avons pas le droit de passer cinq ans au pouvoir, il faut être élu pour cela », a-t-il également assuré samedi soir, quelques semaines après avoir annoncé une transition de trois ans maximum.

Selon lui, « le problème ce n’est pas la démocratie, parfois ce sont les personnalités élues qui tordent le cou aux textes pour n’en faire qu’à leur tête ». Il a également justifié le coup d’État par « la dilapidation des deniers publics » par les anciens dirigeants. Le régime avait annoncé à ce sujet la création d’une commission de lutte contre la corruption.

Abdourahamane Tiani a rappelé la mise en place d’un « dialogue national » pour écrire de nouveaux textes régissant la vie politique nigérienne.

Depuis le coup d’État, le Niger fait l’objet de sanctions politiques et économiques  injustifiées de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui a menacé le pays d’une intervention armée.

Alliance sahélienne

Selon le général Tiani, cette organisation « n’a même pas cherché » à « connaître les raisons » du coup d’État. Il déplore que « les populations souffrent de l’embargo ». Fustigé par des pays occidentaux et africains, le régime nigérien s’est trouvé de nouveaux alliés, le Mali et le Burkina.

Abdourahamane Tiani a rappelé avoir créé avec eux une coopération de défense, l’Alliance des États du Sahel (AES), précisant qu’« un accord économique viendrait ensuite ».